ENTREVUE AVEC SOPHIE VILLENEUVE
On parle tous les jours de création de sens dans les grandes organisations, surtout en période de transformation. Pourtant, on ne sait pas tant de quoi on parle et surtout que faire avec cette idée. Quels sont les mécanismes pour donner du sens à et surtout pour ne pas le perdre ?
J’ai posé 4 questions à Sophie Villeneuve, accompagnatrice à la transformation des organisations, Fondatrice de S Comme Sophie. Puis nous avons échangé autour du sujet dans notre Webinaire Théorie VS Pratique #5.
Le sens, c’est la réponse à la question pourquoi.
C’est le lien entre le être (ce que je suis en tant qu’organisation) et le faire (passage à l’action). C’est un fil rouge infini auquel on s’accroche pour aller d’un point A à un point B. C’est le fil d’Ariane qui nous guide à travers le labyrinthe des transformations, et auquel on peut s’accrocher.
Comprendre comment ça marche, c’est activer un levier dans l’organisation. Cela permet d’être attentif et piloter la transformation sans perdre des joueurs, sans que le fil qui relie tout le monde se casse.
Mais maintenir le sens n’est pas qu’une responsabilité individuelle, c’est aussi une responsabilité collective voire organisationnelle.
Lorsque l’entreprise est en période de transformation, on bouscule le quotidien, on dérange toutes les dimensions de l’organisation. Forcément, c’est une période de pleine incertitude. Le cerveau nous envoie des alertes pour retrouver le sens à travers la turbulence. Nous nous mettons à la recherche d’explications, de ressources, de réponses pour rétablir l’équilibre, pour éviter que le sens nous échappe.
C’est cela qui nous crée un sentiment de saturation, de trop plein. Ce que tu appelles la saturation en gestion du changement est finalement un indicateur de la perte de sens.
L’enjeu de la transformation n’est pas de créer du sens, mais d’éviter de le perdre.
Maintenir le sens, c’est faire en sorte que le fil rouge ne se casse pas.
On ne peut pas piloter le sens, tout ce qu’on peut faire, c’est mettre en place les conditions favorables. J’ai identifié 10 pistes de travail pour essayer de maintenir le sens. En voici 3 :
Maintenir le sens, c’est un ensemble d’attitudes à développer. Pour l’organisation, c’est se demander comment combiner les bonnes attitudes, assurer une place à chacun, mobiliser, donner accès à la formation. Cela demande de mettre à disposition des espaces pour créer un langage commun, pour vivre des choses ensemble, pour se fabriquer des histoires communes. Le sens adore les récits !
C’est aussi voir les choses en profondeur, voir loin et large en écoutant différentes perspectives, en référence aux écrits de Gaston Berger.
C’est faire autrement et prendre des risques. C’est mettre l’humain au cœur de nos organisations. Ce qui compose nos entreprises dépasse la technologie et les processus, ce sont les personnes qui forment ce collectif qu’est l’organisation.
Il n’y a pas de temps 0 dans les organisations, on a tous des temporalités différentes et les rythmes diffèrent selon l’activité quotidienne, les projets ou les événements. Les informations n’arrivent pas toutes en même temps dans les équipes, les surcharges et les ralentissements non plus.
Pour faire face au sentiment d’accélération que cela provoque, il faut arriver à définir des étapes, des grands jalons pour que les équipes rejoignent la temporalité à des moments précis. Le temps long est un allié précieux dans les situations de transformation.
L’identité organisationnelle est le point de départ pour se propulser dans l’avenir. Pour se projeter dans 10 ans, il est incontournable de savoir qui on est, ou qui on doit être aujourd’hui.
Savoir qui on est en tant qu’organisation nous aide à maintenir le sens.
Elle se définit en 3 points :
Ce n’est pas facile de trouver des solutions efficaces. Le sujet est complexe et cela oblige à réfléchir de manière systémique. Voici quelques exemples pour s’inspirer.
En tant que dirigeant
C’est la maîtrise d’œuvre. Il doit cibler les enjeux réels pour ensuite pouvoir prendre des décisions éclairées et éclairantes.
En tant que gestionnaire
Si vous gérez un programme de transformation, c’est pour un objectif précis. Aussi, il faut activer des leviers politiques, économiques et fonctionnels. Exemples :
En tant qu’employé
Nous sommes tous responsables du sens qui permet de construire l’avenir. Aussi, si votre fil rouge se casse, vous pouvez participer à le réparer.
Il y a bien d’autres leviers à activer pour maintenir le sens dans les organisations.
Chacun a son niveau de responsabilité. Chaque dimension de l’organisation doit endosser ses responsabilités, ce qui demande une prise de conscience collective, pas juste individuelle.
Derniers articles